Traitement des déchets dans le sud-Avesnois : le recours devant le conseil d’état retoqué

5 avril 2024 à 18h44 par Paul Schuler

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C’est un nouveau rebondissement dans l’affaire du recyclage des déchets du sud-Avesnois. Fin janvier, Mickaël Hiraux, le président de la communauté de communes du sud-Avesnois, avait annoncé, lors de ses vœux, qu’il venait de déposer un recours devant le conseil d’état, après avoir été contraint par le tribunal administratif de Lille d’annuler l’attribution du marché des déchets à recycler au centre de tri SUEZ de Limeil-Brévannes !

Jeudi soir, Maxence Simpère, le 1er adjoint au maire de Fourmies et vice-président du sud-Avesnois en charge de ce dossier, nous a indiqué que leur recours avait été retoqué par la plus haute juridiction. Le conseil d’état a en effet estimé qu’il n’avait pas à revenir sur le jugement rendu, début janvier par le tribunal administratif de Lille.

Ayant été induits en erreur par une mauvaise interprétation des courriers de Citéo (l'un des éco-organismes agréé par l’Etat pour la valorisation des déchets), les responsables de la communauté de communes du sud-Avesnois avaient écarté volontairement de leur dernier appel d’offres la société « Recyclage des Vallées » à Hautmont, filiale du groupe Flamme, par peur de perdre leurs soutiens Citéo (181 000 € par an). Ils avaient donc décidé de confier le tri de leurs déchets à recycler au centre de tri SUEZ basé à Limeil-Brévannes, dans le Val-de-Marne, en région parisienne, soit à 210 km et plus 3h de route de Fourmies, lorsqu’il n’y a pas de bouchon...

Or, le groupe Flamme a proposé une meilleure offre (nettement moins chère), tout en garantissant à la collectivité l’intégralité des recettes liées à la valorisation de leurs déchets à trier. Par ailleurs, les responsables de Recyclage des vallées rappellent qu’ils proposent un tri en « extension des consignes de tri définitif » (le 3ème plastique), sans le moindre surcoût pour leurs collectivités clientes et avec la garantie pour ces dernières « de recevoir l’intégralité des soutiens », conformément aux dernières directives ministérielles.

Les juges du tribunal admiratif de Lille avaient donné raison à la société Recyclage des Vallées d’Hautmont, qui estimait « avoir été écarté injustement de cet appel d’offres », alors qu’ils avaient proposé « le meilleur prix, le centre de tri le plus proche de Fourmies et avec des installations conformes à la législation ».

Pour avoir créé « une distorsion de concurrence basée sur des éléments factuellement erronés », l’attribution du marché au groupe Suez a donc été annulée par décision de justice. Au lieu d’incinérer tous les déchets, comme c’est le cas depuis le 1er janvier, grâce à cette « jurisprudence », le sud-Avesnois peut donc aujourd’hui reprendre le marché en cours (ou en relancer un) et confier le tri de ses déchets à recycler à la filiale du groupe Flamme, avec l’assurance de recevoir ses 181 000 € de soutiens annuels, tout en économisant 50 000 € par an de frais qu’il aurait fallu débourser pour transporter les déchets du sud-Avesnois jusqu'en région parisienne...

Pour le sud-Avesnois, cette histoire commence à coûter beaucoup d’argent. Outre les 3 mois de pertes de recettes liées à la valorisation des déchets à recycler, Maxence Simpère nous a annoncé que le SIAVED, nouveau gestionnaire de l’incinérateur de Maubeuge, a augmenté de 20 % sa facture par tonne de déchets à brûler.  Et d'autres taxes vont augmenter dans les mois à venir : la taxe générale sur les activités polluantes va passer de 12 à 25 € pour l'incinération  (et de 24 à 65 € la tonne pour le stockage). On nous annonce aussi une hausse de la taxe carbone sur le tonnage de déchets incinérés... Bref, il est urgent de revenir au tri des déchets à recycler, pour faire baisser le tonnage de l'incinération et récupérer les recettes liées à la valorisation des déchets !

En refusant d’adhérer à un syndicat mixte (le SIAVED en l’occurrence), on rappelle que la communauté de communes du sud-Avesnois garde ainsi la maitrise totale de ce dossier, ayant la compétence pleine et entière ! Elle gère déjà en régie la collecte des déchets et la gestion des déchetteries. Elle a la compétence pour déléguer ou gérer en direct le tri, la valorisation et l’incinération de ses déchets.

On rappelle aussi au passage que « pas un seul texte de loi n’impose un minimum de 500 000 habitants pour maintenir un syndicat mixte des déchets (c’était l’un des arguments pour dissoudre le SMIA) ou pour construire un centre de tri conforme à la règlementation. Il n’y a pas non plus d’obligation d’adhérer à un syndicat ou d’investir 10 millions d’euros dans l’achat d’une nouvelle ligne de tri. Le sud-Avesnois peut rester indépendant. Il n’y a pas non plus de tonnage minimum ou d’agrément CITEO... Toute cette histoire n’était qu’un leurre, basé sur des prescriptions techniques d'un appel à projet Citéo, pour obtenir des aides à l'investissement ! 

La décision du conseil d’état de ne pas donner suite au recours déposé par le sud-Avesnois valide ainsi le jugement du tribunal administratif de Lille : désormais, seul l’arrêté ministériel du 7 décembre 2023 (NOR : TREP2322632A), qui est entré en vigueur le 1er janvier 2024, est le seul texte de référence pour les élus. En d’autres termes, Citéo ne fait pas la loi, mais doit l'appliquer, comme les autres éco-organismes agréés par l’état.

Reste maintenant à attendre la décision qui sera rendue par le conseil d’état quant à la dissolution contestée du SMIAA, le syndicat mixte d’incinération de l’arrondissement d’Avesnes. Le rapporteur public préconise l’annulation de cette dissolution. Les sages vont-ils suivre son avis. Réponse dans quelques jours...